Permaculture et agilité

Épisode 3 publié le 28/12/2018

Nicolas Bétheuil

Nicolas Bétheuil

Nicolas Bétheuil est développeur. Il a appris simultanément la permaculture dans sa vie personnel et l'agilité dans sa vie professionnelle. Il a remarqué de nombreuses similitudes entre agriculture respectueuse de la nature et l'agilité en entreprise, notamment les pratiques Scrum et XP, Extreme Programming.

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Transcript

Nicolas tu as fait une présentation il y a quelques mois sur les similitudes entre Agilité et Permaculture. Nous allons y revenir. Tu te présentes comme artisan logiciel sur Linkedin, tu peux nous en dire plus ?

Il y a 5 ou 7 ans, j'ai découvert l'agilité et au fur et à mesure de ma pratique du développement, je me suis amélioré. Ce qui m'a permis de me poser plus de questions sur mon travail au quotidien, à m'améliorer. Et cela m'a amené aux pratiques de tests, de qualité logicielle, les pratiques d'usine. Ce qui fait qu'on forge un logiciel au fur et à mesure et je parle d'artisan logiciel pour ne pas parler de Craftmanship, mais c'est exactement la même notion. De création et d'itération sur le logiciel, ce qui permet de s'améliorer, dans ses pratiques et dans ce qu'on livre aux clients et utilisateurs.

Tu travailles avec quels langages de programmation ?

Ces derniers temps, plutôt sur JavaScript. Ma dernière activité c'était sur du Javascript côté Back avec Node.js. Il y a 7 ans, je travaillais avec Java. Et dans un mois je serai sur du Scala, ELM et d'autres langages fonctionnels.

Quelles sont pour toi les méthodes Agile ?

Déjà, on ne va pas parler de méthode. On va parler de cadre de travail. Et l'Agilité c'est tout sauf souple. Ce sont des cadres de travail très rigoureux, très strictes mais qui permettent de développer au fur et à mesure ce qui est réellement attendu, ce qui amène vraiement de la valeur. Par un ensemble de pratiques extrèmement rigoureuses.

Et qu'est-ce que la permaculture ?

La permaculture est une approche de l'agriculture. L'agriculture telle qu'elle a été conçue et notamment après les deux grandes guerres, a été comment réutiliser tout ce qui a été produit pendant les guerres. Les usines chimiques ont été converti en usines de production d'engrais et les usines de tanks en usines de production de tracteurs, d'outils. Du coup on a l'impression que c'est pour faire la guerre à la terre que pour travailler avec. La permaculture c'est comment entrer dans un cercle vertueux pour produire de la nourriture, pour exploiter au mieux ce que la nature nous apporte.

Comment es-tu venu à la permaculture ?

En fait, j'habite une résidence dans le 12è arrondissement de Paris, pas très loin de Montgallet et de Nation. Cette résidence, c'est 600 logements et 14 étages, bref une grosse résidence. Une des personnes de la résidence s'est reconverti en développement durable et mon lieu de vie est devenu son laboratoire. Il est devenu maître-composteur. Et dans la résidence cela a commencé par deux bacs à compost. Ensuite, quelques parcelles de jardin privatives et collectives. Cela a continué avec l'arrivée des abeilles. Il y a eu aussi les poules. On a 5 poules. Et tout récemment, on a créé une mare, pour boucler l'écosytème, qui est recréé. Au fur et à mesure de fréquenter cette personne... Il y a eu des ateliers divers et variés et s'est posé la question de comment gérer tout ça.

Cette personne a tout de suite inclu tous les résidents dans le projet ?

Il présente son activité comme étant un lien social et pour retrouver un lien avec la terre, pour nous pauvres citadins qui ne voyant que le béton et la grisaille. Ce n'est pas forcément trivial surtout pour une résidence aussi grande. Il y a environ 60 composteurs sur 600 logements. Mais quand il faut remuer le bac de 600 litres de compost, on ne va pas se cacher, c'est souvent 3 ou 4 personnes... Le maître-composteur a fait une "tombe" sur sa parcelle qui est une technique de permaculture qui s'appelle la culture "en lasagnes". On intercalle des couches de matières brunes, de matières vertes pour reconstruire un sol. Du coup, cela a une forte apparence de tombe surtout quand on met un tuteur au bout de la parcelle. Et il y a mis ses tomates, ses salades, ses aromates, etc. Forcément, ça amène de la curiosité.

Et d'où viennent les déchets verts, cela vient de la parcelle ?

On dérive une partie de nos déchets de cuisine, principalement, les épluchures, le café, le thé, les légumes en trop qu'on ne peut plus consommer.

Et tout le monde joue le jeu ?

Sur les 600 logements, il y en 60 qui compostent.

D'accord, il y a encore 90% de la résidence à convertir...

Mais on a déjà une bonne douzaine de bacs de 600 litres. On a tellement de volume qu'on fait un bac de 600 litres en un seul mois. On a un compost mûr en 9 mois, là où un particulier aura besoin d'un an, un an et demi. Là, ça monte en température, il y a de la diversité, ce qui fait qu'on a des cycles plus courts.

En terme de production de légumes, vous êtes auto-suffisants ?

Évidemment ! (rires) Avec 2 mètres carré de terre chacun... On n'est pas du tout autonome. C'est vraiment plus pour le loisir. Pour les découvertes, pour le lien que cela peut créer. De causer à ses voisins qu'on croise à peine dans les escaliers. C'est vraiment pour le fun. Parfois, on voit une parcelle entière faite de fèves où on imagine que les personnes les récoltent et ont font leur repas pour toute la famille. Il y a des haricots, des tomates, des salades, du persil, des fraises, pleines de choses...

Y a t-il des difficultés à faire de la permaculture en ville ?

C'est évident, c'est très compliqué. Déjà, pourquoi faire de l'agriculture en ville ? Pourquoi se poser la question de faire un lien avec la terre. C'est quelque chose qui n'est pas du tout trivial, même si à Paris, il y a de plus en plus d'initiative, que ce soit des composts de quartier, que ce soit des parcelles collectives ou individuelles. On y vient de plus en plus. Visiblement, le citadin a besoin de se reconnecter. On n'est pas forcément dans la permaculture complète. On est sur approche différente du jardinage en ville.

J'ai fouillé ton Github et je suis tombé sur "Deluge". Tu présentes cela comme un outil pour suivre la consommation d'eau du jardin partagé. Et tu l'as écrit en PHP et JavaScript. Peux-tu nous en dire plus ?

Au début, il n'y avait pas de point d'eau à l'endroit où on cultive. Il fallait ramener son arrosoir de chez soi. On a demandé à notre bailleur de faire venir de l'eau jusqu'au jardin, jardin qui s'appelle d'ailleurs le jardin Santerre. Il y a une deuxième partie qui s'appelle le "jardin sans eau". Ce n'est pas dénué d'humour. Il y a avait donc la question de comment on allait gérer cette eau. Comment on va réussir à éduquer les gens de ne pas constamment remplir leur arrosoir matin et soir, pour arroser leur parcelle. L'une des idées était de suivre la consommation et afficher le prix que le bailleur va nous refacturer. Au final, le mètre cube de flotte c'est vraiment pas cher. Donc l'éducation ne passera pas par là. Et voilà, l'idée est de relever régulièrement le compteur d'eau, on note et on fait la projection annuelle, pour savoir combien on va payer. Dire aux gens que là il y a 300 € d'eau. Si vous arrosiez un peu moins... C'est la gestion des ressources.

Comment en es-tu venu à comparer Permaculture et Agilité ?

En fait, j'ai découvert en même temps l'Agilité et la Permaculture. Je me suis reconverti au développement logiciel il y a 7 ans. J'ai emménagé dans cette résidence il y a une dizaine d'années. Et je me suis rendu compte de similitudes, sur justement, comment gérer les ressources correctement. Sur un projet logiciel, il y a des ressources. Comment ne pas faire la guerre à ce qu'on est censé utiliser et comment les utiliser de manière efficace et efficiente.

Quels sont les problèmes similaires dans la vie en entreprise et dans l'agriculture ?

En fait, on va déjà parler des problèmes de l'agriculture. L'un des soucis en agriculture c'est le travail des personnes. C'est une profession dans laquelle on se suicide énormément. Et on ne se suicide pas n'importe comment. On se suicide en buvant, en consommant les engrais ou les pesticides. C'est quelque chose qui est quand même très violent. En fait, ils se rendent compte que les produits qu'on leur a dit d'utiliser tuent la terre, les insectes, mais aussi la vie microbienne. Et on redécouvre que cette vie dans la terre est absolument indispensable pour réussir à avoir des productions suffisantes, efficaces et efficientes. On a fait oublier aux agriculteurs qu'il fallait travailler avec la terre. On leur a dit pour simplifier leur travail, ne faites que des grands sillons d'une seule et même plante. On a des énormes champs de blés. On parle de monoculture. Et, comme on utilise une seule et même plante sur des grandes parcelles, il y a un appauvrissement de la terre. On est obligé d'aider la plante de se défendre des nuisibles éventuels. Bref, plein de problème sur la monoculture, sur l'épuisement des sols, sur l'absence de vie du sol et bien sûr le travail à perte. Et ce qu'on entend beaucoup c'est que les agriculteurs ne sont pas suffisamment rétribués pour leur travail et ils sont obligés d'investir plus sur des productions plus grosses pour réussir à continuer à financer... Les agriculteurs sont obligés d'aller forcément vers l'agriculture intensive pour les banques, pour continuer à avoir des prix intéressants sur les entrants qu'ils utilisent, etc. Un peu comme les projets informatiques, plus c'est gros, plus on est sûr que ça va se planter. Et malheureusement cela ne repousse pas. On va mettre la pression sur les équipes parce que le chef de projet ou le commercial a vendu quelque chose avant même d'en parler à son équipe ou même avant d'avoir une équipe. Donc on a d'abord la relation commerciale avant de se poser la question de ce qu'on veut faire.

Souvent, effectivement, dans les entreprises, les commerciaux et les développeurs sont un peu en guerre. Ce sont les opposés alors qu'ils devraient travailler ensemble.

Il devrait y avoir effectivement plus de collaboration car chacun a ses avantages et inconvénients pour échanger... Plus il y a d'échange, plus c'est riche. Le croisement des cultures est forcément intéressant. Du coup, il va y avoir de l'épuisement des équipes. On va parler énormément de "turn over" également. Les gens, comme ils sont là que pour exécuter un contrat, vont réaliser les tâches qu'on leur demande. Se lever le matin n'a pas de sens.

Du coup, qu'est-ce que la permaculture apporte à l'agriculture ce que l'agilité apporte à la vie en entreprise ?

En permaculture on va se poser la question de comment on va travailler avec, comment trouver des synergies, d'observer... Quand on commence une exploitation en permaculture, en fait il va y avoir un an d'observation de l'écosystème qu'on a devant les yeux. De voir comment on va devoir rééquilibrer. Parce que la parcelle qui va être utilisée n'était pas dans ce mode là donc il n'y a pas l'écosystème suffisant en terme d'ombres, d'humidité et de vie dans le sol ; une grosse base de connaissances de la nature. On va devoir en faire le moins possible. On va avoir les mêmes choses en agilité. L'idée n'est pas de venir avec quelque chose d'imposé. L'idée sera d'aller vers une co-construction, avec un métier qui a un besoin et une équipe qui peut apporter des solutions aux besoins et problèmes qui lui sont posés. En espérant déjà que le client expose des problèmes et non des solutions... (rires). Du coup, il y a un ensemble de mécanismes... C'est plus large que ce qu'exprime le manifeste Agile. Le manifeste a été écrit par des personnes extrêmement expérimentées. C'était présenté comme voilà les solutions pour réussir à produire quelque chose efficacement. Mais elles ont oubliées plein de choses : pourquoi faire du poker-planning, pourquoi estimer les tâches ensemble et pas chacun de son côté ou au fur et à mesure. En fait, il y a un tout un ensemble psychologique. Un projet c'est avant tout de l'humain. Tous les rituels qui sont proposés par Scrum plus spécifiquement ont une réalité psychologique. Ils sont là pour contrecarrer les fonctionnements humains. S'il y a un leader dans une équipe qui va s'exprimer, les autres vont l'écouter. Du coup, il n'y a pas d'échanges. Ou le leader n'a pas forcément toutes les solutions ou les bonnes idées. Une autre personne peut avoir des choses à apporter. C'est en me documentant, qu'autant la permaculture que l'agilité c'est une étude d'un système : on appelle cela la systémique. Je ne m'étendrai pas sur la théorie car je suis trop léger. L'idée c'est : observer, mesurer pour s'améliorer au fur et à mesure et apprendre. Apprendre autant dans l'observation de la nature qu'apprendre des interactions des personnes entre elles. C'est par les entrées et les sorties de chaque individu, de chaque rôle - parce que les rôles sont très importants. Pareil, pourquoi je vais avoir besoin d'un PO (Product Owner), si possible une seule personne ? C'est cela qui va protéger l'équipe de l'ensemble du reste du système de l'entreprise. Si l'équipe est exposée au reste de l'entreprise, forcément il va y avoir trois services différents qui vont demander des choses sur un même produit. S'il n'y a pas une personne qui est là pour centraliser les informations, pour arbitrer les différents sujets, forcément l'équipe va être parasitée dans son efficacité, dans sa vélocité, dans sa production. Donc il y a bien un besoin d'analyse, d'arbitrage qui est à faire par ce que Scrum représente comme PO. Dans d'autres organisations on va parler de proxy-PO, d'analyste métier. C'est un rôle qui est très complexe. Pareil, quelque chose qui est très important pour le PO c'est de centraliser le budget et l'arbitrage. Dans beaucoup d'entreprises on va séparer cette notion budgétaire d'un côté et la roadmap du projet d'un autre côté. On n'a plus une seule personne qui est capable de dire ça par exemple pour la mission qu'on m'a donné, est-ce que c'est vraiment important ?

Tout cela sont des mécanismes psychologiques humains qui sont indispensables. On peut dire qu'on a besoin d'une équipe de PO pour faire les spécifications, les tests... Très bien, mais à un moment donné, on a besoin d'une tête pour arbitrer ce qu'on veut, ce qu'on ne veut pas. L'agilité repose de manière dogmatique comment sont les flux dans une équipe. Comment sont les entrées et les sorties d'une équipe. Dans la permaculture, on a la même idée : regarder comment les éléments vivent les uns par rapport aux autres. Et je vais essayer de trouver comment réduire les nuisibles, booster la production de fruits, comment amener un insecte particulier, par exemple des abeilles pour favoriser la pollinisation. Dans une équipe projet, si j'ai un tech-lead et un ensemble de junior, comment je vais faire pour réussir à amener toutes ces personnes à travailler ensemble et pas juste avoir une relation de mentorat. Comment réussir à faire que les gens vont s'exprimer, exprimer leur individualité pour favoriser le collectif.

Cela ne peut pas être le rôle d'un Scrum Master ou d'un Coach Agile dans ces cas là ?

Exactement. Parfois un Scrum Master va suffire. Parfois le Scrum Master n'aura pas la sensibilité suffisante ou l'expérience et va donc avoir besoin d'un accompagnement par le PO ou d'un accompagnement technique du côté de l'équipe de développement, plus craftman. "Magnifique je fais des itérations" mais "je ne fais pas de tests", donc comment je met en production régulièrement ? Comment je vais pour livrer régulièrement ? Je vais avoir des entrants à mettre dans mon système pour favoriser les équilibres pour le faire durer le plus longtemps possible. En permaculture ou dans une équipe, la même question se pose : comment durer le plus longtemps possible ? Comment arriver à avoir une agriculture soutenable ? Comment réussir à continuer à faire évoluer le produit, régulièrement ?

Je retiens donc ce que tu disais : le Scrum Master ou celui qui prend ce rôle, ne va pas imposer des choses, il va distiller des idées et accompagner et le permaculteur, pareil il ne va pas imposer des choses à la nature, il va laisser vivre...

Et quels sont les outils et les techniques qui sont similaires entre Agilité et Permaculture ?

Le seul élément où je ferrai un parallèle c'est entre la richesse qu'on va avoir dans l'écosystème qu'on construit pour la permaculture, de mon sol est vivant autant au niveau microscopique que macroscopique. Je vais avoir des insectes, des vers de terre, tout ces éléments qui vont vivrent ensemble qui vont permettre de décomposer la matière organique. Ce qui va permettre de donner vie à des champignons, de nourrir des bactéries. Chaque élément à son importance pour réussir à tenir un équilibre. Si je n'ai plus de champignon, les nutriments vont moins voyager. Il y a un livre qui a écrit sur la forêt, "la vie secrète des arbres". Ils ont découvert que dans une forêt les champignons véhiculent les nutriments d'une racine à une autre. Même si les racines ne se touchent pas, un arbre sain va nourrir un arbre malade à côté. Une souche qui a été coupée il y a 100 ans continue à vivre, même sans feuille, sans photosynthèse, sans rien. Les nutriments arrivent par les racines.

De la même manière, en Agilité, on parle souvent du cadre de travail, de Scrum. Mais malheureusement ce n'est pas suffisant. Sans pratiques XP, sans environnement riche, sans culture du développeur, on ne va pas réussir d'itérer, de produire régulièrement, d'ajouter... ou d'enlever, car le mieux c'est quand on enlève du code.

Tu peux nous dire ce que sont les pratiques XP ?

Les pratiques XP, on parle d'Extreme Programming. C'est une manière de travailler. On parle de TDD, Test Driven Development qui contrairement à ce que son nom l'indique n'est pas une pratique de test, mais une pratique de conception. J'ai encore un collègue qui m'a remercié hier soir de l'avoir fait chier là dessus. Ensuite, il y a le Pair-programming qui est une des pratiques que je préfère parce que justement cela permet d'avoir des relations entre deux personnes, de voir les problèmes plus tôt. On va parler de BDD, Behavior Driven Development : quand je vais écrire mon test, je ne vais pas écrire qu'1 + 1 = 2, je vais parler de quand j'ajoute un item dans mon panier, j'ai le nombre d'éléments et le prix total qui vont se mettre à jour. 1 + 1 = 2 n'a aucun sens alors qu'en parlent de panier et de facturation, je parle métier. Je vais faire attention au vocabulaire que je vais utiliser. Je vais avoir une personne du métier à côté de moi qui va me dire "non, regarde tu as + alors qu'il fallait -" ou ce genre de choses.

Des deux côtés, c'est par le mélange, par la richesse des individus et de l'écosystème qu'on va réussir à produire mieux, plus (ou pas) dans nos activités. Dans les deux cas, on va avoir besoin d'excellence, d'expérience des personnes. Mais aussi d'expérience alchimique : "et si je fais ça qu'est-ce qui se passe ?". En informatique, on va parler d'A/B tests.

Le permaculteur aussi fait du A/B testing...

Le permaculteur a plus de recul. Il a un environnement qui est plus fini. Il va utiliser pour faire ses mélanges, il va avoir des plantes compagnons. Par exemple, il va mettre un plant de tomate et un plant de basilique l'un à côté de l'autre. Parce que le basilique va repousser les nuisibles de la tomate. La tomate va fournir un peu d'ombre mais pas trop au basilique pour qu'il puisse croître.

Et une salade tomates, basilique c'est très bon.

Exactement ! Pas que dans l'assiette mais aussi au niveau de la nature.

De la même manière, on va accueillir le changement, dans la permaculture et dans l'agilité, pour s'adapter tout simplement. On est dans un monde qui change. Les températures vont monter. Je ne vais peut-être pas continuer à faire des champs unique de tomates. Je vais avoir besoin de pailler le sol pour préserver l'humidité. Le paillage comme son nom l'indique, je prends de la paille et je la met par terre. Il y a un exemple d'un agriculteur qui fait ses tomates sur du fumier, uniquement ça. La plante n'est pas du tout irriguée de l'année. Il met la graine dans le fumier et si la plante survit, très bien, c'est qu'elle est adapté à l'écosystème. Elle n'a pas besoin d'eau et elle résiste aux maladies. Au fur et à mesure, il réussit à sélectionner ce qui fonctionne. Il est dans le sud de la France, dans un endroit assez aride et en altitude. La tomate vient d'Amérique du Sud. Les tomates n'aiment pas les climats froid ou sec. On arrive par l'expérience à faire plein de choses.

Pour finir, comment tu te vois, les prochains mois, les prochaines années, par rapport à ton jardin partagé et par rapport à ta vie de développeur ? Comment vas-tu concilier les deux ?

L'un de mes rêves c'est clairement de partir de Paris, d'avoir ma maison et mon petit jardin. De sortir des grandes
villes et devenir de plus en plus autonome. Cela risque d'être nécessaire à un moment ou à un autre.

Alors justement il y a pas mal de gens qui disent qu'il vaut mieux se regrouper et garder le côté partage, comme le jardin partagé. Là tu parles plutôt d'avoir ton truc à toi ?

Oui. On peut s'efforcer le plus possible de faire de l'agriculture en ville mais ce n'est pas l'endroit de base. Ou cela va être compliqué. Il y a une initiative de culture en conteneur qui permet de...

Je crois que c'est Agricool, c'est ça ?

Oui, Agricool. Ils ont amenés un conteneur à Dubai pour faire des fraises. La fraise dans le désert ça ne pousse pas. Là ils arrivent à faire une culture et l'amener au plus près du consommateur. Mais, ce n'est pas ce que m'enseigne la permaculture. La permaculture m'enseigne de revenir à des choses les plus simples possibles. De ne pas monter en technologie. Parce que la technologie ne sera pas forcément tout le temps là. De réapprendre ce qu'est une tomate, ce qu'est une salade. Est-ce qu'une salade d'un mètre de haut est normale ? Oui, car une salade ça monte, mais ce n'est pas forcément comestible. De revenir vers des choses les plus simples possibles. Ce que nous enseigne aussi l'Agilité. De faire KISS, Keep It Simple and Stupid. C'est comme cela qu'on va durer le plus longtemps possible. Donc, oui la petite maison avec son jardin.

Et ta vie de développeur dans 5 ans, 10 ans ?

Je ne sais pas si je serai toujours développeur dans 5 ou 10 ans. Parce que c'est compliqué de trouver des missions qui ont du sens. Dans 5 ou 10 ans, j'aurai 45 ou 50 ans. Est-ce que j'arriverai à toujours trouver de l'activité ou est-ce que je ne serai pas trop cher ? Est-ce que mon expérience sera toujours utile et nécessaire ? Est-ce que j'aurai réussi à me tenir à niveau.

Alors là tu poses un autre problème, le jeunisme dans notre profession mais là c'est un autre débat. Merci Nicolas d'avoir partager ton expérience de jardin partagé à Paris et ta vie de développeur et à bientôt.

Merci de m'avoir inviter, c'était une expérience très enrichissante ! Salut !

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