Tiers-lieu de la transition écologique joyeuse

Épisode 81 publié le 16/11/2023

Marion Crosnier

Marion Crosnier

Marion Crosnier a créé le tiers-lieu les Ciboulettes dédié à accompagner la transition écologique des personnes, entreprises et collectivités vers un monde désirable et durable. Son local est atypique car il prend place dans une gare RER à Chelles en Seine et Marne. Au micro du podcast Techologie, retour sur son parcours, sur sa vision des tiers-lieux, son regard sur le monde de la tech, comment sortir de l'entre-soi dont les initiatives écologistes sont victimes, comment aller plus et plus vite, ...

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Transcription

Extrait

Je pense que des tiers lieux comme ça ont un super rôle à jouer pour que des personnes qui sont en transition, trouvent une communauté. Et c'était aussi mon besoin et ça le reste.

Introduction

Nous sommes à la gare de Chelles-Gournay, dans un éco-lieu qui est hébergé dans la gare et qui s'appelle les Ciboulettes. Et on est avec Marion Crosnier. On va parler bien sûr de cet éco-lieu.

Peux-tu nous raconter ta vie antérieure, ce que tu faisais avant de créer cet éco-lieu ?

Si je remonte dans le temps, je suis sortie d'une école de commerce parisienne. Après, j'ai voulu faire un truc que je trouvais vraiment super, c'est du conseil en stratégie. Quand j'étais encore à l'ESCP Business School, j'ai passé des entretiens et je suis allé faire du conseil dans un grand cabinet américain qui s'appelle Bain. J'y suis resté 5 ans. Après ça, je suis allée travailler pendant 3 ans au Bon Coin, où j'ai plein de postes différents, et j'ai eu la chance de construire une équipe qui avait pour mission de construire la culture client au sein du Bon Coin. Puis, j'ai travaillé un an dans une autre start-up qui s'appelle Getaround, qui était anciennement Drivy sur le partage de voitures, en tant que directrice de la relation client. Et ensuite je me suis envolée pour construire un projet bon pour moi, bon pour les autres et bon pour la planète.

Avant de parler de ce projet, peux-tu nous raconter quel a été le déclic pour te lancer dans un projet un peu fou, à la fois associatif et aussi une entreprise qui est dédiée. Et ce qu'est les Ciboulettes aujourd'hui ?

Il n'y a pas vraiment un déclic. Il y a plein d'événements, un chemin et une pierre posée après l'autre. Un premier gros chamboulement dans ma vie au bout de 5 ans de conseils, un gros burn out. Très concrètement, je n'ai plus de vie à l'intérieur de moi. Je ne sais plus comment je m'appelle. Je pense que je ne suis pas faite pour le monde du travail et que je pourrai jamais retourner travailler quelque part. Je pense que je ne suis pas adaptée. Cela a mis un an avant que je refasse surface, que l'envie revienne de retrouver des projets collectifs avec d'autres.

Au bout d'un an, au moment où je quittais le conseil, là, deuxième énorme chamboulement dans ma vie, c'est la perte, le deuil de mon premier bébé, Sybille qui est morte-née. Et donc là un deuxième effondrement. Une douleur très différente, qui est moins personnelle, mais tout aussi grande. Et là, je me pose vraiment la question, mais c'est quoi la vie en fait ? C'est où mon chemin de vie ? Et j'ai dans l'esprit, cette image qu'il y aurait ma vie qui serait dans une ligne droite et moi, je marche en parallèle sur une autre ligne droite. Je ne suis pas sur mon chemin.

Complète remise en question d'énormément de choses. J'ai la chance, pendant ces quelques années là d'être au Bon Coin, d'avoir des équipes super, beaucoup d'amis au travail et une ambiance de travail assez festive et épanouissante. Du coup, je me questionne beaucoup sur le sens de ma vie, le sens de tout ça et le sens du travail. Je me questionne aussi beaucoup sur la façon dont on interagit au travail. Plus le temps passe et plus je remarque qu'on travaille en pyramide et que ça ne va pas. Et j'ai très envie de travailler en cercle, en écosystème. Et en fait, ça va me guider sur ce chemin là, parce que, porté par tous ces sujets, je me suis formée avec les Colibris et l'Université du Nous à la gouvernance partagée.

Au Bon Coin et ensuite chez Drivy, j'ai essayé de mettre en place, dans mes équipes, des outils pour travailler de façon plus démocratique, plus collaborative. Je suis tombé sur les bouquins de d'Emmanuel Druon, qui est le patron de Pocheco, une entreprise du Nord qui a changé sa gouvernance mais aussi sa mission, à fabriquer des enveloppes, mais vraiment en mode économie circulaire. J'ai lu son premier bouquin sur la façon dont il avait changé sa gouvernance.

Après, je suis venu au sujet environnemental. Au même moment où je me posais beaucoup de questions sur tout ce fonctionnement et cette violence au travail qui m'allaient plus du tout, ma soeur se posait à peu près les mêmes questions et elle avait une grande sensibilité environnementale. Moi, j'ai apporté plutôt ma sensibilité humaniste, des relations humaines et elle, m'a fait prendre conscience de l'état actuel de nos écosystèmes. Grâce à elle, je suis allé voir des conférences de Cyril Dion. Ça a été un gros déclic pour moi de lire dans ses yeux que c'était grave. Je me suis formée avec la fresque du climat, etc.

Je dirais que chaque chose s'emboîtent bien l'une avec la précédente et ça a mis longtemps quand même. J'ai ouvert les Ciboulettes il y a 4 ans et mon burn-out, c'était il y a 11 ans. Il m'a fallu au moins 6 ans de chemin pour aboutir un peu plus.

Extrait en cuisine

Raconte-nous ce qu'on fait aux ciboulette ? Tu es partie sur les questions liées à l'alimentation, du bien-être, etc. Et pas forcément du développement personnel ?

Oui, notre première idée avec ma sœur, c'était effectivement d'avoir comme mission, d'avoir un lieu ou pas.

Au départ, on n'était pas partis pour avoir un lieu. Au départ, on s'était dit si on veut sensibiliser à une autre façon de vivre, l'alimentation, c'est le meilleur sujet parce qu'on peut se régaler à table, qu'on mange tous plusieurs fois par jour, pour les chanceux, et qu'on va toucher du doigt très facilement.

Ensuite, les sujets d'écologie, etc. Autant que de santé.

Donc, on avait notre première idée de monter un organisme de restauration collective, mais hyper engagé, où la cantine serait un lieu de bien manger et de pédagogie. C'était les premières Ciboulettes au singulier.

Assez vite, on a compris qu'on serait 30% plus cher qu'un gros acteur du marché qui a des marges arrières et qui fonctionne avec des gros volumes. On voyait la limite du modèle qu'on voulait expérimenter.

Et puis, on a croisé la route de la SNCF et c'est là que ça s'est transformé dans un lieu et qu'on a pensé, du coup, les Ciboulettes comme un lieu pour prendre soin de soi, des autres et de la planète.

Très vite, aux Ciboulettes, on a eu comme idée d'avoir deux structures qui pourraient cohabiter. Une structure associative qui permet aux adultes, aux enfants, aux familles du territoire de venir ici pour un coworking, par exemple, mais avec des échanges super enrichissants, comme c'est le cas aujourd'hui, aux jours de vendredi.

Venir pour un repair café pour faire réparer sa bouilloire, comme venir pour une fresque du climat ou un atelier d'automne pour se familiariser avec les enjeux climatiques.

Venir parfois pour un atelier de couture ou de l'éveil musical pour les petits pour montrer au cerveau qu'on peut penser les choses autrement. Et je crois que c'est vraiment le rôle de l'art.

Enfin bref, toute une série d'activités. Il y a pas mal de yoga aussi ici, plein de choses.

Il y a ce principe de docratie. Est ce que tu peux nous en parler ?

Oui, alors il y a de la gourmandise, effectivement, parce que je ne l'ai pas reprécisé, mais il y a pas mal de choses ici autour de l'alimentation, notamment les brunchs, les brunchs des familles qu'on fait trois ou quatre fois par an.

Et la docratie, c'est la gouvernance qu'on a essayé de mettre en place aux Ciboulettes pour impliquer tout le monde.

Effectivement, les premières années, c'était moi qui faisais qui pensait, qui faisait beaucoup.

Et puis à un moment, j'ai commencé à être un peu fâchée quand les gens venaient me voir en me disant "j'ai une idée pour toi".

Je me suis dit en fait, moi aussi, j'ai assez d'idées pour moi même. Je manque juste de temps pour les réaliser.

Donc là, je me suis dit OK, il faut qu'on pense le truc pour que les gens prennent les choses en main.

Et donc on a guidé par la gouvernance de la fresque du climat. On a mis en place la docratie.

Donc tu as une idée ? Just do it quoi. Vas-y, tu peux le faire. On prête les clés hyper facilement des Ciboulettes pour que chacun puisse proposer des idées et les mettre en place.

C'est typiquement le cas là bientôt avec la journée de lutte contre les violences faites aux femmes, où tout le programme a été bâti, du coup, de la journée sans moi.

Il y a le repair café complètement issu de cette docratie.

La culture de notre petit jardin en permaculture aussi gérée par des bénévoles qui proposent de temps en temps des ateliers pour faire partager ce qu'elles font.

Et donc, effectivement, ça a créé une communauté qui est vraiment l'idéal de ce que j'imaginais pour ce lieu.

Ce matin, on sort d'une marche du temps profond qui était merveilleuse, enfin chamboulante aussi. Tu veux en dire quelques mots ?

Faites le, si vous avez l'occasion autour de chez vous, allez faire la Deep Time Walk ou marche du temps profond.

J'ai trouvé ça assez émouvant de retourner quelques millions, milliards d'années en arrière, en fait, et de voir l'accélération et l'impact de notre civilisation, de notre petite civilisation, du monde occidental, sur ces quelques milliers d'années seulement. Même ces quelques ces deux siècles de rien du tout.

Oui, typiquement, la marche du temps profond a été organisée ce matin par le trésorier des Ciboulettes, qui est aussi mon conjoint et qui a proposé ça aux adhérents et aux motivés qui avaient envie de se joindre à nous.

Et c'était aussi l'occasion, pendant le déjeuner, après de débrief, de parler d'une autre initiative de la docratie qui va voir le jour.

C'est Béatrice qui va proposer bientôt des Bike Party. Voilà pour qu'on démocratise le vélo dans les rues de Chelles et qu'on montre à quel point il est chouette de se déplacer en deux roues, même en hiver.

Peut être quelques mots sur le terme les Ciboulettes. Pourquoi avoir choisi les Ciboulettes ? Est-ce que c'est une aromatique qui pousse toute l'année et qui revient chaque année, en fait, qui ne meurt pas avec l'hiver, peut-être ? C'est ça ou ça vient d'où ?

Ça pourrait être aussi cherché que ça, mais ça ne l'est pas. En réalité, au départ, c'était ciboulette, donc au singulier.

Et ma sœur avait fait une liste des noms qu'elle trouvait frais et sympas et légers. Et voilà, plein de verts un peu et donc dedans, il y avait ciboulette.

Je dis, ah, c'est chouette, ciboulette.

Coriandre ne faisait pas partie de cette liste.

Coriandre ne faisait pas partie de la liste. Et je pense que c'est parce que j'aime bien le mot chouette aussi. Je dis, bah, c'est chouette, ciboulette.

Et après, en fait, on a commencé à se tester assez rapidement avec des ateliers autour de l'alimentation, parce que c'est un de nos sujets de prédilection auprès des enfants, par exemple, et les enfants nous ont appelés les Ciboulettes.

Et on s'est dit, bah, OK, ça va être les Ciboulettes.

Donc, les Ciboulettes, c'est un écolieu, c'est un tiers lieu. Ce tiers lieu, justement, on est à Chelles, à 15 minutes de Paris, en train. Comment ce tiers lieu s'ancre dans son territoire ? Comment l'association travaille avec les acteurs du territoire, les acteurs de l'économie sociale et solidaire, mais pas que, avec les acteurs, les commerçants, avec les institutions, avec la mairie. Mais aussi, peut-être, deuxième question, avec les personnes qui ne sont pas forcément sensibles à l'écologie, les personnes défavorisées, les personnes des cités, puisqu'il y a des cités forcément à Chelles, il y a des personnes défavorisées. Comment sortir aussi de cet entre-soi ?

Oui, il y a beaucoup de questions dans ta question.

Bon alors, d'abord, on n'est pas les champions de la mixité sociale aux Ciboulettes.

Clairement, ça fait partie des sujets sur lesquels on a encore beaucoup de travail. On est en centre-ville, les gens qui viennent, c'est essentiellement des gens blancs, culturellement favorisés, donc qui ont fait des études.

On essaie quand même d'avoir quelques actions pour avoir plus de mixité sociale ici. On est hyper soutenu par l'agglo Paris-Vallée de la Marne pour un certain nombre d'ateliers parents-enfants.

On fait beaucoup d'ateliers de pâtisserie végétale qui sont du coup subventionnés à 100% par l'agglo. Donc, ils sont gratuits pour les familles et là, ça nous permet d'avoir des gens qui sont davantage mixés.

Il y a une adhérente aussi qui a créé, en issue de la docratie, les cafés parents. Là, on ne demande pas d'être adhérent, rien du tout. Il n'y a pas d'inscription, c'est ouvert à tout le monde, c'est complètement gratuit et ça apporte plus de mixité aussi.

Quand on peut, on anime des fresques du climat pour des publics moins favorisés aussi. Je pense aux Jeunes de la Sûreté Judiciaire qu'on a pu accueillir.

Parfois aussi, on accueille pour témoigner les jeunes des systèmes d'orientation de la ville qui sont un petit peu perdus dans leur orientation.

On essaye d'être le plus possible en lien avec les associations du territoire qui, elles, ont des publics défavorisés qui sont leurs bénéficiaires.

Je pense par exemple au CCAF, Collectif Chrétien d'Action Fraternelle et au Secours Populaire.

Typiquement, on est un lieu de collecte pour ces associations.

Donc, on collecte les boîtes de Noël, par exemple, pour le Secours Populaire. Pour le CCAF, dès qu'on peut et qu'on organise un team-building de pâtisserie végétale ou de cuisine végétarienne avec une entreprise, on propose de donner tout ce qu'on a fait pour les bénéficiaires du CCAF. Là, je réfléchis à d'autres partenariats avec eux.

On est partenaires aussi, par exemple, de Féminité Sans-Abris pour lesquels on fait des collectes d'échantillons de soins et on réalise ensuite des trousses pour ces femmes qui sont à la rue.

Voilà, c'est la façon dont on essaie de gérer ça parce que nous, nos adhérents, nos bénéficiaires, ils viennent pour expérimenter des activités écologiques, pour retrouver ici un lieu de lien social, échanger, partager, apprendre, mais ce ne sont pas des publics très défavorisés.

Extrait de la vie aux Ciboulettes, le coworking du vendredi

Tu as travaillé dans la tech, dans les startups, etc. Enfin, a posteriori, quel est ton regard aujourd'hui sur le monde de la tech, sur le monde des startups ? Est-ce qu'on baigne en plein technosolutionnisme ? Est-ce que les startups, la tech, a vraiment pris le tournant des enjeux environnementaux, selon toi ?

Bon, je suis pas du tout une experte du sujet. Je pense déjà qu'on peut pas parler de la tech, en général.

Je pense qu'il y a plein de mouvements et de courants dans la tech, et tu en es un exemple parfait, Richard.

Effectivement, j'ai travaillé pour des startups. Alors, ça fait rire tout le monde, il faut le savoir, quand j'ai commencé à travailler dans les startups, parce que vraiment, je crois que j'étais la dernière de mes amis à avoir Internet chez moi.

J'ai jamais été très à écran, j'ai pas la télé chez moi aujourd'hui. J'ai jamais été très fan d'avoir le nouveau smartphone ou quoi. Enfin, je m'en fiche un peu, quoi. C'est pas du tout ça qui me donne la joie dans ma journée, d'être derrière un écran. J'ai jamais joué à des jeux vidéo et tout ça, bref.

Ce que j'observe, moi, peut-être plus quand j'interviens dans les startups, etc., c'est effectivement, plus on travaille dans la tech, plus on a peut-être envie de penser que la technologie va tout résoudre.

Et là, j'ai vraiment envie de plutôt citer Aurélien Barreau et de dire, quand bien même ce serait possible, ce qui ne l'est pas, est-ce que ce serait vraiment souhaitable de continuer à résoudre et faire fonctionner un système qui est autodestructeur de vivants ?

Quand j'essaye d'avoir le plus d'empathie possible envers toutes les barrières et les freins et les biais cognitifs qui se présentent à ceux qui viennent d'être au courant du sujet, des enjeux, je vois bien que le fait de pouvoir s'abriter derrière, mais ce n'est pas possible.

Normalement, on nous a appris depuis tout petit que quand il y avait un problème, il y avait une solution technique, on va bien pouvoir réparer ça. Je comprends que ce soit tentant, mais je n'en ai pas beaucoup d'illusion.

Tu me disais, on en parlait il y a quelques temps, que ça fait quatre ans que tu as ce tiers-lieu. Aujourd'hui, tu es quand même un peu fatigué de former des gens sur des sujets et que tu as l'impression que ça n'avance pas. Comment, justement, un tiers-lieu comme ici, peut-être un outil qui fait avancer davantage la transition écologique ou tous les sujets environnementaux, en tout cas, ou sociaux, solidaires, comment ça peut être un outil puissant, comment on peut aller beaucoup plus loin ?

Je pense que les lieux ancrés comme ça sur leur territoire, peu importe que ce soit un tiers-lieu, peu importe, les projets comme ça ancrés sur leur territoire, qui sont des projets de lien social, de discussion, je pense que c'est fondamental de décentraliser à la fois les discussions, les prises de conscience et les moyens d'action.

Dans les scénarios de l'ADEME, de transition, je crois beaucoup à celui qui est vraiment dans la prise de pouvoir et de puissance des territoires et la relocalisation à la fois des sources d'énergie, mais pas que, en fait, des principaux besoins de vie.

Je pense que des tiers-lieux comme ça, ils ont un super rôle à jouer pour que des personnes qui sont en transition, elles trouvent une communauté. Et c'était aussi mon besoin et ça le reste.

En fait, c'est pour ça que j'adore les vendredis ici, c'est qu'aller sensibiliser des gens qui ne le sont pas du tout, c'est à chaque fois, pour moi, me prendre une mini-baffe, parce que je trouve ça dur, en fait.

Je trouve ça dur de voir qu'il y a autant de désinformation qui circule dans nos sociétés et autant de gens qui sont coupés de mèmes, coupés du vivant, aussi insensibles, je trouve ça dur.

Et donc, je pense que créer des lieux comme ça, où les gens vont pouvoir se rencontrer, imaginer, créer, mobiliser toute leur créativité pour imaginer un monde super demain, je trouve que c'est ça qui donne la patate et la joie.

Donc, je pense que ces lieux ont un grand rôle à jouer, pas que dans l'information, mais vraiment dans la création de communautés.

Qu'est-ce qui aujourd'hui t'irrite et qu'est-ce qui t'apporte de la joie ?

Alors, il y a plein de choses qui m'irritent, finalement. On en parlait tout à l'heure, c'est drôle, mais ce qui m'irritent, ce sont des projets avec une mission dite engagée, mais un fonctionnement qui n'est pas du tout. Il y a dissonance.

Ouais, j'aime bien la cohérence de bout en bout, ce n'est pas forcément facile, ça demande de se remettre en question, pas mal d'humilité et tout ça, bon d'accord.

Mais en fait, quand on a un fonctionnement pyramidal dans un projet qui se veut vertueux pour la biodiversité, il y a un problème.

D'un côté, on fonctionne en triangle, de l'autre en rond. Bon, peut-être qu'il faut aligner le truc.

Le greenwashing m'irrite énormément. Donc, une compagnie aérienne qui vous dit "Mais génial, vos petites cuillères sont recyclées", ben, en fait, ça me rend dingue.

Et je pense que ce qui m'irrite aussi beaucoup, c'est la réflexion de dire "Ah non, mais l'homme est comme ça". Je trouve que c'est tellement réducteur.

C'était encore Aurélien Barreau qui disait ça il n'y a pas longtemps, en disant "Mais en fait, c'est raciste de dire ça". Ben ouais, parce qu'en fait, ce n'est pas l'homme qui est comme ça. C'est un type de culture hyper récent, occidental, qui est comme ça.

Mais ce n'est pas du tout l'intégralité des cultures et des civilisations qui ont été destructrices comme ça, de tout le vivant autour d'elles.

Je trouve aussi que généraliser une culture d'une civilisation à l'ensemble de ses participants, je trouve ça moche aussi. Je pense qu'il y a plein d'individus qui aimeraient se différencier, mais qui n'ont peut-être pas la possibilité ou la réflexion, je ne sais pas. Mais ça, ça m'irrite.

Alors, ce qui m'apporte de la joie, il y a plein de choses qui m'apportent de la joie. C'est vrai que typiquement, quand j'anime des ateliers sur le climat ou la biodiversité ou l'intelligence collective, mon entreprise ou collectivité et que j'entends des gens qui me disent "Merci, j'ai appris des choses et en fait, j'ai envie d'agir maintenant". Ça, ça me donne énormément de joie.

Me retrouver aux Ciboulettes et voir un soir, une soirée jeu, le lendemain, un café par an, un cours de couture, ensuite du yoga et puis un hyper café et puis un vendredi coworking.

De voir le lieu se métamorphoser, accueillir des publics si différents, toujours dans un esprit low-tech, de lien social, collaboratif, dans le vivant, je trouve ça génial. Ça, ça me met vraiment vachement en joie.

Et je dirais que ce qui m'apporte aussi beaucoup de joie, c'est de continuer à rencontrer des personnes engagées dans leur domaine et ce qui leur fait du bien. De voir la variété des moteurs de l'action, je trouve ça vraiment extraordinaire.

Si on a envie de venir voir les Ciboulettes ou participer aux Ciboulettes, comment on fait ?

Il faut aller voir sur notre site, lesciboulettes.org. Tous les mois, on a un planning qui change.

Sans doute, il faut adhérer pour soutenir la structure ou venir participer à un atelier pour ceux qui demandent ça.

On essaie de faire beaucoup de choses en participation libre, donc normalement, le budget n'est pas un frein.

Et puis, peut-être venir un vendredi coworker à côté de nous, c'est un bon moyen de se mettre à table à l'heure du déjeuner avec plein d'échanges super et des personnes au moins autant super autour de la table.